NIFFF 2011 : Le gore, d’un mode de représentation à son institutionnalisation
Cet article revient sur le cycle consacré au cinéma gore lors de l’édition 2011 du Festival International du Film Fantastique de Neuchâtel, en se basant sur la conférence (et l’ouvrage) de Philippe Rouyer d’une part et sur les films sélectionnés lors du festival d’autre part, pour s’attacher aux problèmes liés à sa définition en tant que sous-genre cinématographique.
Pour cette édition 2011, le Festival International du Film Fantastique de Neuchâtel a décidé de consacrer son « cycle rétrospective » à un sous-genre bien particulier du cinéma fantastique/d’horreur : le gore. Pour revenir sur cette facette sanglante de l’histoire du cinéma, trouvant ses racines entre autres dans le Théâtre Grand-Guignol et devenue aujourd’hui une composante habituelle du cinéma dominant1, la direction artistique du festival a décidé de segmenter le cycle en trois parties : un retour aux « prémisses du genre » retraçant une esthétique du sang, des « expérimentations de Méliès au meilleur du fantastique gothique des 50’s2 ; la section « Le seigneur du gore » articulée autour du travail de Herschell Gordon Lewis (invité du festival) ; et finalement un axe intitulé « le cinéma de la pure sensation », regroupement hétérogène de quinze films formant le panthéon du splatter. A cette sélection s’ajoute celle effectuée par Eli Roth, invité d’honneur du festival et lui-même réalisateur de néo-splatter3, dans le cadre la Carte Blanche qui lui a été offerte ; l’occasion de proposer un regard contemporain quant à la postérité du (sous)genre. Cette volonté d’offrir un parcours historique linéaire et pointu, se matérialisant clairement dans le catalogue officiel du festival, est cependant rendue problématique par son agencement horaire obéissant aux contraintes logistiques du festival.
Cette rétrospective est l’occasion pour nous de revenir sur ce sous-genre horrifique peu traité dans la littérature francophone, d’en questionner les définitions et d’explorer et interroger les pistes données par la programmation du festival. Nous choisissons de suivre la structure historique donnée par celui-ci pour aborder ainsi les racines du gore, l’œuvre d’Herschell Gordon Lewis, et le gore en tant que sous-genre du cinéma d’horreur. Nous apporterons enfin un regard critique quant aux choix du festival et quant à la postérité du gore dans la production cinématographique contemporaine.
Les « prémisses du genre », ou le gore comme esthétique du sang
Premier pan de la rétrospective, le retour aux « prémisses du genre » visait à réconcilier histoire et esthétique à travers la projection de cinq films et une conférence accompagnée de diverses projections d’extraits de films donnée par Phillipe Rouyer, auteur du principal ouvrage en français sur le cinéma gore4. Lors de son intervention de 90 minutes, durant laquelle il a présenté et illustré le premier chapitre de son ouvrage, Rouyer a offert à son public un échantillon de certains « plans gore »5 – c’est-à-dire de plans caractérisés par la présence prononcée de sang – datant des débuts du cinéma jusqu’aux années 1920. Néanmoins, bien que le critère de la présence du sang soit respecté, les cinq extraits choisis par Rouyer sont eux-mêmes emblématiques de la diversité des formes du gore et, par là, des difficultés liées à sa définition. Dans son ouvrage, Rouyer revient sur les origines étymologiques du gore en expliquant que :
« [le] Barnhart Dictionary of Etymology […] propose comme définition ‹ sang répandu, sang coagulé ›, [et] situe l’apparition du mot, dans son orthographe actuelle, aux alentours de 1150. Il en retrouve l’origine dans le vieil anglais gor (saleté, excrément), de la même famille que gyre et apparenté à gor (saleté en vieil allemand), goor (minable, miteux en hollandais) et gor (substance visqueuse en vieil islandais). […] Plus tard, Shakespeare utilise gore pour signifier la souillure quand Macbeth raconte comment il a tué les gardes de Duncan. […] L’Oxford English Dictionary signale l’expression blood and gore comme obsolète au XXe siècle. »6
Comment ce terme peut-il donc être appliqué à une pratique cinématographique codifiée, sans tomber pour autant dans une vision téléologique ? La proposition de Rouyer consiste à envisager, à travers une approche historique, cette pratique comme une esthétique du sang, qu’il illustre à travers cinq plans gore.
Le plus ancien des extraits, La séparation des sœurs siamoises (Docteur Eugène Doyen, Clément-Maurice, France, 18987), bande commanditée par le docteur Doyen pour documenter une opération chirurgicale qu’il effectue devant la caméra, est un cas très particulier : le film devait à l’origine être limité au champ scientifique et médical et servir à des fins documentaires et pédagogiques selon l’auteur, sans que l’on ne puisse néanmoins écarter une composante promotionnelle. Une copie du film, et ce malgré les précautions prises par Eugène Doyen, sera contretypée et diffusée en dehors du circuit médical8. Ce premier exemple de plan gore trouve donc son origine dans le monde très particulier du cinéma chirurgical : il ne s’agit pas ici d’effrayer le spectateur9 mais plutôt « [d’]enregistrer les exploits successifs et coordonnés du scalpel »10, c’est-à-dire documenter et diffuser une certaine pratique professionnelle. On peut donc postuler que l’effet gore dans La séparation des sœurs siamoises n’est pas dû à une intention de l’auteur, mais est plutôt perçu dans la réception qui en est faite par le spectateur. On peut encore noter que La séparation des sœurs siamoises est le seul exemple donné par Rouyer d’un film gore11 présenté sans artifice, mais qui s’inscrit néanmoins dans un cadre scientifique dénué de toute intention narrative12.
Les deux autres films montrés remontant à l’époque du cinématographe-attraction13 sont L’horrible fin d’un concierge (Pathé, France, 1903) et Les incendiaires (Georges Méliès, France, 1906) (fig. 1). Autant pour la bande Pathé (un film comique dans lequel on peut voir un concierge se faire littéralement écraser derrière une porte) que pour l’actualité reconstituée de Méliès (dans laquelle on assiste à la mise à mort d’un condamné par la guillotine), Rouyer souligne que ces brefs fragments de gore relèvent « davantage d’une volonté d’exagération comique que d’une intervention naturaliste »14. Bien que dans le cas du premier film cette déclaration soit difficilement contestable, on peut tout de même s’interroger sur les intentions de Méliès quant au tableau de la guillotine dans Les incendiaires : le gore semble ici s’inscrire dans un dispositif plus complexe. Précédée d’un tableau qui représente le condamné dans sa cellule et ses cauchemars liés à son exécution future, la scène de la mise à mort est montrée avec une rigueur méthodique : on assiste à l’installation de la machine, aux tests de fonctionnement, à l’exécution et même à son nettoyage ; le sang jaillit d’ailleurs non pas au moment de la décapitation même, mais lorsque la tête est déplacée de son réceptacle au panier qui sert à transporter le cadavre. L’insistance sur l’application de la sentence peut aussi se retrouver dans d’autres bandes contemporaines au film de Méliès15 : ainsi Les martyrs de l’inquisition16 (Lucien Nonguet, France, 1905) fait voir différents supplices subis par les personnages des martyrs, et dans lequel le sang a été colorié au pochoir ; The Execution of Mary, Queen of Scots (Alfred Clark, E.-U., 1895) se contente de nous montrer la décapitation. Dans le cas de ces deux reconstitutions historiques, plutôt que de s’attarder sur des notions de « délire cartoonesque »17 ou de gage de réalisme, il conviendrait de souligner la stratégie sensationnaliste qui est mise en place. Cette stratégie se manifeste dans la première reconstitution à travers le coloriage du sang au pochoir – que l’on ne peut attribuer à personne en particulier mais qui reste toutefois un acte volontaire –, et, dans la deuxième, à travers le fait de tourner une bande ayant pour seule vocation de montrer une exécution détachée de tout contexte diégétique.
Le quatrième extrait choisi par Rouyer est tiré d’Intolerance (D. W. Griffith, E.-U., 1916), plus précisément du plan de l’épisode babylonien durant lequel le ventre d’un soldat est transpercé par une lance ennemie. Bien que filmé en plan d’ensemble, on aperçoit clairement le sang qui se répand sur le torse nu du soldat. Griffith serait donc ici, selon Rouyer, « parmi les premiers à faire couler le sang à des fins dramatiques »18 ; ce qui paraît une évidence puisque ce dernier est l’un des principaux acteurs de l’institutionnalisation et de la narrativisation du cinéma. Nous sommes ici face à un cas dans lequel l’effet gore intentionnel est utilisé comme un gage de réalisme, sans pour autant subir un traitement filmique particulier (comme un gros plan) (fig. 2 à 4).
Ce traitement filmique diffère justement dans le dernier extrait choisi par Rouyer, qui n’est autre que la mémorable séquence d’ouverture d’Un chien Andalou (Luis Buñuel, France, 1929), durant laquelle l’œil d’une femme est tranché par une lame de rasoir en gros plan. Pourtant, et contrairement à Griffith, Buñuel ne recherche pas ici le réalisme mais plutôt la rime visuelle. Le gore va ici créer un effet de choc sur le spectateur, ce qui implique que cette séquence ne va pas – contrairement aux précédentes – jouer sur l’attente du spectateur ni sur l’éventuelle fascination liée à cette mutilation mais sur la surprise, sur une très courte durée. D’autres motifs apparentés au gore sont également présents dans ce court-métrage19, mais tous s’inscrivent dans le même paradigme et relèvent principalement d’une volonté d’association libre et poétique sans préoccupation de réalisme.
Parallèlement à ces cinq extraits choisis et commentés par Rouyer, la direction artistique du festival a également projeté dans leur intégralité cinq films mettant en jeu une « esthétique du sang » : Un chien Andalou20, déjà cité par Rouyer ; The Revenge of Frankenstein (La revanche de Frankenstein, Terence Fisher, G.-B., 1958) et Les yeux sans visage (Georges Franju, France/Italie, 1960), faisant usage du gore dans un cadre diégétique chirurgical (fantastique pour le premier, proche d’un réalisme quasi documentaire pour le second) ; La maschera del demonio (Le masque du démon, Mario Brava, Italie, 1960) qui inscrit le gore dans une tradition héritée de l’horreur gothique italienne ; et finalement Mondo Cane (Cette chienne de vie, Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi, Italie, 1962) qui distille le gore dans un style documentaire sensationnaliste, commentaire condescendant du narrateur à l’appui.
Une des composantes centrales de ce tableau des prémisses du genre gore, le Grand-Guignol, est citée à maintes reprises dans le catalogue officiel du festival de Neuchâtel, la littérature spécialisée et par les producteurs de films gore eux-mêmes. Le théâtre parisien à l’origine de ce nom a évolué parallèlement aux films que nous venons de citer, puisqu’il s’est ouvert en 1897 et a fermé ses portes en janvier 1963, soit « quelques semaines avant la mise en chantier de Blood Feast »21. Jouant sur la surenchère d’effets horrifiques et également victime de la censure, le Grand-Guignol met l’accent sur les effets spéciaux et ne rechigne par à montrer des effusions de sang sur scène.
Nous sommes revenus sur les origines du mot gore, antérieur au cinéma et considéré comme obsolète au XXe siècle. Les films que nous avons cités contiennent des « plans gore », mais aucun d’entre eux n’a été désigné en tant que tel au moment de sa réalisation. C’est David F. Friedman, producteur de Blood Feast (Orgie sanglante, H. G. Lewis, E.-U., 1963), qui, dans une lettre adressée à Jean-Claude Romer22, utilisera pour la première fois le terme pour désigner ce film, insufflant au vocable une nouvelle vie dans le champ cinématographique et décernant par là-même à Herschell Gordon Lewis son futur titre de « seigneur du gore ».
Herschell Gordon Lewis, le « seigneur du gore »
Invité du festival, cet ancien professeur d’anglais devenu réalisateur de nudie cuties23 est unanimement considéré comme le premier réalisateur de films gore. Son premier film gore, Blood Feast (1963) (fig. 5), sera déterminant dans la mise en place des spécificités du splatter : il présente cinq scènes de meurtres sanglantes liées par une structure narrative très lâche24. A la manière d’une comédie musicale, les scènes de meurtre fonctionnent comme des numéros attractionnels, avec leur spécificité et suivant un mouvement de crescendo constant. Lewis filme ces scènes de manière très détaillée, en usant de gros plans et d’une quantité importante de faux sang. Réalisé pour moins de 25 000 dollars, Blood Feast répond aux stratégies du « film d’exploitation » : lors du festival, Lewis a répété à plusieurs reprises sa production comme le film que « les majors ne pouvaient pas faire, et ne voulaient pas faire »25. La « facture » globale du film en témoigne : scénario et dialogues primaires, jeu d’acteur improbable, quantité de plans tournés avec une mise au point mal réglée… Mais Lewis et son producteur avaient compris que la force du film résidait dans ses cinq scènes gores inédites au cinéma. Ces scènes de violence « gratuite » vont lui assurer le succès au box-office et inciter les deux partenaires (et bien d’autres réalisateurs et producteurs après eux) à poursuivre dans la lancée : à savoir la recette d’un sous-genre cinématographique extrêmement rentable et reposant sur un petit budget.
Lewis poursuivera dans cette voie et s’établira en tant qu’auteur de film gore. Dans un premier temps, avec deux autres volets de la trilogie du sang26 : Two Thousand Maniacs ! (2000 Maniaques, H. G. Lewis, E.-U., 1964), avec ses massacres de touristes yankees du nord par des rednecks lors du centième anniversaire de la dévastation de leur ville par les troupes nordistes ; et Color Me Blood Red (H. G. Lewis, E.-U., 1965), sur un artiste utilisant le sang de ses victimes pour peindre ses tableaux (fig. 6 à 9). Il continuera à réaliser des films gore jusqu’au début des années 1970. Dans sa filmographie, il convient de citer The Wizard of Gore (H. G. Lewis, E.-U., 1970), qui met en scène un magicien mutilant des jeunes femmes choisies parmi le public lors de ses représentations. Son dispositif scénique a influencé les films néo-gore (ou de torture porn)27, en jouant sur un effet de mise en abyme du film et en mettant en scène un double diégétique du spectateur qui assiste impuissant à des scènes de torture (tout en sachant qu’il s’agit d’un tour de magie28).
Lors de ses interventions durant le festival, Herschell Gordon Lewis présentait ses films avec modestie, mais utilisait toutefois une rhétorique bien rôdée qui témoigne de son habitude à participer à des festivals et de sa maîtrise de son image29. Sa carrière de réalisateur a d’ailleurs fait l’objet d’un documentaire qui vise à l’élever au statut d’auteur et initiateur d’un genre, Herschell Gordon Lewis : The Godfather of Gore (Jimmy Mason et Frank Henenlotter, E.-U., 2010), projeté lors du festival30.
« Le cinéma de la pure sensation », ou le gore en tant que genre cinématographique
Suite au relatif succès commercial de Blood Feast et à l’attrait des productions petit budget, un certain nombre de réalisateurs ont repris la formule et abusé d’hémoglobine et de mutilations à l’écran. Dans le cadre de sa rétrospective, le NIFFF en a choisi quinze. Mais du très noir À Meia-Noite Levarei Sua Alma (A minuit, je possèderai ton âme, José Mojica Marins, Brésil, 1964), en passant par les zombies assoiffés de sexe de Shivers (Frissons, David Cronenberg, Canada, 1975), jusqu’à l’excessif ReAnimator (Stuart Gordon, E.-U., 1985) (fig. 10) ou jusqu’au portrait quasi psychanalytique du psychopathe de Maniac (William Lustig, E.-U., 1980), on ne peut que constater l’hétérogénéité du gore en tant que sous-genre de l’horreur.
A cette sélection du NIFF s’ajoute une « Carte Blanche à Eli Roth », c’est-à-dire trois « incontournables » choisis par l’acteur-réalisateur : il s’agit de The Wicker Man (Robin Hardy, G.-B., 1973), film d’horreur qu’il serait audacieux de classifier de gore ; Dawn of the Dead (Zombie, George Andrew Romero, E.-U., 1978)31, charge contre la société de consommation extrêmement bien reçue par la critique, malgré des difficultés liées à la censure ; et finalement Mil gritos tiene la noche (Le cri du cobra /Le sadique à la tronçonneuse, Juan Piquier Simon, E.-U./Espagne/Puerto-Rico, 1982), archétype du film d’exploitation gore des années 1980 qui bascule involontairement dans le registre du comique par son excès de violence. Les interventions d’Eli Roth durant le festival se sont limitées à ce « menu » et à une conférence de presse, sous-exploitation d’autant plus regrettable que ce dernier est le réalisateur de Hostel (Eli Roth, E.-U., 2005), film qui s’inscrit dans la lignée des splatter ayant fait leur réapparition dans le milieu des années 2000 ; cette œuvre est aussi à l’origine du terme « torture porn » utilisé par David Edelstein pour qualifier l’abus de violence dans les productions hollywoodiennes récentes32.
L’objet gore ne se laisse pas aisément circonscrire : un historien du cinéma peut ainsi identifier des plans gore jusque dans le cinéma des premiers temps. L’hétérogénéité du corpus présenté au festival de Neuchâtel souligne l’absence de critère distinctif qui permet d’affirmer qu’un film appartient au genre du cinéma gore.
La présence de sang et de violence à l’écran semble représenter le critère le plus évident. Mais nous avons vu que sa présence n’est pas suffisante pour justifier l’appellation gore – sinon, Les incendiaires ou Saving Private Ryan (Il faut sauver le soldat Ryan, Steven Spielberg, E.-U., 1998) constitueraient des films gore à part entière.
Le gore ne serait-il donc pas un genre cinématographique ? La langue anglaise opère une distinction entre splatter (qui équivaut au genre cinématographique) et gore (qui renvoie au meurtre, au sang et à la violence). Cette distinction lexicale peut paraître anodine, mais elle permet de faire la différence entre un genre et une esthétique utilisée, entre autres, par celui-ci. Cette distinction posée, il est aisé d’affirmer que Saving Private Ryan contient du gore. Le gore, en tant qu’esthétique, pourrait être défini comme un mode de représentation qui exprime son refus de la suggestion en maintenant dans le cadre des scènes de violence explicite avec pour but ultime de provoquer le dégout chez son spectateur – sans pour autant rechercher, comme c’est le cas pour l’horreur, un effet de surprise. Précisons que ce mode de représentation s’applique aussi bien à des productions cinématographiques qu’à des représentations théâtrales.
La dénomination splatter pourrait s’appliquer aux films faisant appel au gore comme mode de représentation principal. Blood Feast et Braindead (Peter Jackson, Nouvelle Zélande, 1992) utilisent tous deux le gore comme mode de représentation, mais pour achever un effet différent : choquant pour le premier et comique pour le second. En tant que genre cinématographique, le splatter a connu un essor dans les années 1960, un âge d’or dans les années 1970 et un déclin (avec toutefois une série de films jouant sur des effets postmodernes comme la citation où l’autoréflexivité). La résurgence du genre dans les années 2000, à travers la catégorie de néo-splatter33, semble activer les même procédés en soulignant le contexte historique et social34 ou le rapport de l’individu à son image : si les victimes des splatter des années 1960-1980 sont tuées dans un but précis35, les victimes des néo-splatter semblent torturées pour assouvir le plaisir de leur bourreau36.
Force est de constater que le NIFFF a effectué un choix audacieux quant à la programmation de son « cycle rétrospective » : il offre à la fois un regard critique et une programmation variée dans laquelle le profane comme le spectateur averti trouveront leur compte. Un regard sur le gore éclairé tant par un spécialiste du genre que par une des figures majeures de ses débuts et de sa diffusion, et servi par un corpus hétérogène – mais choisi avec rigueur – qui reflète une volonté de la part du festival d’élever le débat sur cet objet particulier.